Si tu ne t'aimes pas, tu ne peux pas aimer ?
"Si tu ne t'aimes pas, tu ne peux aimer."
Cette phrase revient beaucoup en ce moment
dans les messages que je lis. Et chaque fois, elle me dérange. J'ai bien
compris que l'on ne peut pas offrir ce que l'on ne possède pas. Cela parait
évident d'un point de vue matériel, mais au niveau des sentiments, je trouve
que cela ne s'applique pas.
Lorsque je décide d'écrire afin d'y voir
plus clair et laisser les mots et la compréhension apparaitrent sur l'écran de mon ordinateur, je lis à ce moment-là :
"Aucun amour n'est suffisant pour
combler le vide d'une personne qui ne s'aime pas elle-même."
Irène Orce
Irène Orce
Et là ça résonne en moi, oui, tant que je
ne m'aime pas, je ne peux pas le recevoir de l'extérieur. Car je ferme la
porte. Je mettrais tôt au tard cet amour en doute. J'aurais besoin de preuves,
de validations et de plus en plus d'amour, pour m'assurer qu'il est réel.
Ne pas m'aimer ne met pas en cause celui
que j'éprouve vers l'extérieur. C'est un élan impétueux qui échappe à mon
raisonnement.
Je me rappelle un moment fort dans ma vie,
j'allais entrer dans un magasin avec ma petite fille que je tenais par la main.
Je ne me rappelle pas si elle m'a parlé, mais j'ai tourné mon regard vers elle
et à cet instant, j'ai ressenti un amour pour elle si immense et une gratitude
intense s'est exprimée de l'avoir dans mon existence, que mes larmes ont
coulées sur mon visage, j'étais comme touchée par la grâce. Un moment suspendu
de quelques secondes qui ont transformé à jamais ma vision d'aimer.
Pourquoi à ce moment ? Il n'y a avait rien
de particulier et la situation ne s'y prêtait pas... Mais je peux dire par
cette expérience et bien d'autres que l'on peut aimer même si l'on ne s'aime
pas. La différence entre aimer lorsqu'on s'aime et lorsqu'on ne s'aime pas
n'est pas dans la manière de le vivre, mais dans celle de l'accueillir.
Ce torrent d'amour qui a émergé de moi
avec une telle puissance m'a fait peur. Même s'il a duré que quelques secondes,
j'ai senti la peur d'être envahie et de perdre pied. Après avec le recul, j'ai
compris la chance de le vivre et j'avais hâte de le revivre. Mais lorsque vous ne
vous aimez pas, cette puissance d'amour qui vous saisit le corps et l'âme
ressemble à un raz de marée prêt à vous engloutir.
Car l'amour fait peur. Cela parait
absurde, pourtant, je vous l'assure l'amour peut vous faire peur. Lorsque votre
expérience a créé des croyances d'être indigne d'aimer et d'être aimé, tout ce
qui peut les remettre en question ouvre un vaste vide en vous. Cela remet en
cause tout votre système de croyances, votre mental s'affole, votre ego crie au
désespoir comme-ci il allait mourir.
Et ce n'est pas qu'une image, nous
n'imaginons pas comme nous sommes conditionnés par le petit enfant que nous
avons été. Nous sommes construits sur lui et par lui. Et notre ego défend cette
construction en la croyant être son identité. Si nous remettons en question ces
croyances, l'ego croit en son extinction.
La peur que nous avons lorsque l'on reçoit
l'amour est notre ego qui a peur de sa destruction. Alors on va prendre la
fuite. On va disparaître ou tout faire pour s'extraire de cet amour qui brûle
nos illusions avec des comportements destructeurs. Il n'y a rien à juger, mais
plutôt à comprendre le fonctionnement. Une fois celui-ci dévoilé on peut voir
la nécessité de s'aimer pour accueillir l'amour, aussi bien le sien que celui
d'une autre personne.
S'aimer ouvre de l'espace en soi, nous ne
sommes plus étriqués avec nos blessures et nos jugements. Cet amour de soi
forme de l'ouverture pour accueillir ce qui est bon pour soi. On reconnait sa
valeur et nous ne sentons pas en danger lorsque l'amour d'une autre personne
vient cogner sur nos barrières de croyances de "je ne suis pas
aimable".
S'aimer revient à dire en douceur à notre
ego, je m'aime même si je porte encore la croyance que je ne suis pas aimable.
Je change de positionnement, je m'aime et deviens aimable par moi-même avant de
l'être par les autres. Un espace se crée et on réagence nos croyances. Une
transformation peut prendre place pour ensuite être dirigée vers : je m'aime et
je peux être aimé par d'autres.
Lorsqu'une personne court après l'amour,
qu'elle fait tout pour être aimée et en demande toujours plus. Dans son for
intérieur, elle pense que cet amour va combler un manque intérieur. Et c'est
pour cela qu'elle est de plus en plus en demande. Qu'elle prenne l'image d'une
mendiante ou de la furieuse jalousie, ce ne sont que des masques.
Elle porte la croyance que l'amour de
l'extérieur remplira ses blessures intérieures. Elle s'est construite enfant en
pensant que si elle était aimée par ses parents, elle serait protégée et ne
souffrira plus. Alors adulte, son ego la pousse à chercher son trésor à
l'extérieur qui la remplira de joie et de sécurité. Elle ne le trouvera jamais,
tant qu'elle ne fera pas une introspection en conscience qui lui permettra d'ôter
chaque croyance négative.
Dans ces deux exemples, nous avons un
point dénominateur : Notre propre valeur. Dans le premier, je fuis l'amour, car
je ne le mérite pas. Dans le deuxième, je cherche l'amour, car je ne sais pas
m'apporter ma propre sécurité et je ne me crois pas à la hauteur. C'est dans
l'enfance où je n'ai pas été reconnu comme un individu de valeur qui me pousse
une fois adulte à ne pas m'aimer.
La capacité d'aimer est naturelle pour
tous. La capacité à recevoir l'amour ne l'est pas. Même si des personnes ont
l'air de ne pas savoir aimer, elles le font à leurs manières, celles qu'elles
ont vues. On connait tous ce sentiment d'aimer une personne, un animal, mais
nous le manifestons tous de manières différentes. Nous répétons l'exemple que
nous avons reçu ou vu.
L'amour est inné en soi, mais de
nombreuses personnes ne savent pas le manifester, car il était tabou, il y a
encore peu de temps. Pourtant, nous pouvons nous transformer, la vie nous le
présente à chaque instant. Mais pour cela, nous avons besoin de prendre notre
temps, d'être dans la douceur, dans l'accueil et la sécurité.
Et j'insiste sur le dernier point, la
sécurité. Car aimer, manifester l'amour, accueillir l'amour, le recevoir nous
rend vulnérables. On le comprend avec le fonctionnement de l’ego. C'est lui qui
se sent menacé et en voie d'extinction. Ce n'est pas l'âme. Ce n'est pas notre
être, mais comme je me prends pour l'ego, je crois que c'est moi qui suis en
danger.
Nous pouvons aimer sans nous aimer. Selon
le niveau d'où cet amour prend naissance, il revêtira différentes formes.
Mais, nous ne pouvons pas être aimés sans nous
aimer. Oui, car si je me le refuse, je le refuserai aussi des autres. Aimer est
notre vraie nature, nous n'avons pas besoin de notre tête pour le vivre. C'est indépendant
de nous. La forme que cet amour prendra sera filtrée par notre mental.
Être aimé est différent, nous avons le
choix de le faire entrer ou non dans notre vie et dans notre être. Pourtant
nous courrons tous après... Certains le cherchent dans le travail, d'autres
dans la famille, dans les loisirs, dans l'amitié, dans le succès, dans la
beauté, dans la force, dans l'argent... Sans le savoir, inconsciemment, on
recherche cet amour pour se sentir une personne de valeur et être en sécurité.
Puis n'oublions pas, ceux qui donnent de
l'amour à tous et tout sans accepter d'en recevoir. Ils pensent que leurs
capacités à aimer font leurs valeurs. Mais ils ne l'acceptent pas, pensant ne
pas le mériter. J'ai de la valeur à aimer les autres, mais pas assez pour en
recevoir. Car, enfant j'étais aimé selon ce que je faisais, disais ou me
comportait. Je n'ai pas senti l'amour pour l'être unique que je suis, mais pour
celui qui était tourné vers le faire...
Il y a d'autres exemples, cependant
l'origine est toujours dans l'amour que nos parents ont su nous apporter et
sous quelle forme. En ce moment, nous pouvons nous transformer pas en blâmant,
mais en découvrons comment on a construit notre vision de l'amour. Puis, en
prenant conscience que nous ne sommes pas nos croyances ni notre ego. Même si
je sens le vide en moi, la peur, derrière il y a la complétude de l'amour qui
est mon essence et qui rayonne autant lorsque j'aime que lorsque je suis aimée.
Jed